Charles VII,
Georges Minois, Paris, Perrin, 2005.
L'Ouvrage
: " Le jeune Charles de Valois a tout connu : un père
fou, Charles VI ; une mère réputée traîtresse,
Isabeau de Bavière ; l'exil, de Paris à Bourges ;
le crime, avec l'assassinat du duc de Bourgogne Jean sans Peur ;
les désastres militaires. Il lui fallut sept terribles années,
1422-1429, pour recevoir la légitimité du sacre et
il eut encore la contrariété, à la fin de son
long règne, d'avoir son fils et héritier Louis XI
comme principal adversaire.
De plus, ce sont d'autres qui en son temps captent la lumière,
et lui font de l'ombre encore aujourd'hui : Jeanne d'Arc, naturellement,
pour laquelle l'auteur ne nourrit guère d'admiration. Dunois,
Gilles de Rais, Jacques Cur
Pourtant, ce roi mal connu
et peu populaire mérite d'être revisité. Son
entêtement, sa lucidité, sa culture aussi, l'ont conduit
à construire patiemment un nouveau type de royauté,
et à poser les bases d'un Etat moderne. A sa mort en 1461,
les Anglais ont évacué la totalité du royaume,
sauf Calais, le duc de Bourgogne s'est soumis, les grands féodaux,
comme le duc d'Alençon et le comte d'Armagnac, on été
liquidés, la France est redevenue la première puissance
du monde.
Dans une société où la superstition, la folie
et le crime sont à l'uvre comme rarement, où
la vieille chevalerie s'achève en extravagances, le roi Charles
garde la tête froide. Son esprit inquiet, son cur malheureux,
en dépit de ses douze enfants nés d'avec Marie d'Anjou,
trouvent le réconfort et le plaisir dans la jeunesse aimante
d'Agnès Sorel, la Dame de Beauté, première
maîtresse royale officielle de l'histoire de France. "
L'avis des Riches
heures : en matière de biographies, la tendance actuelle
est largement à la réhabilitation des figures historiques
les plus contestées, avec en toile de fond des objectifs
plus commerciaux que scientifiques, souvent inspirés par
des dates anniversaires ou des commémorations ponctuelles.
Cela a pour principal effet de jeter sur le marché des "
travaux " opportunistes empreints de partialité, d'émotivité,
constellés de digressions sentimentales et d'analyses anachroniques.
Ce bel ouvrage de Georges Minois en revanche, s'attache aux pas
d'un roi oublié et malmené par la tradition historiographique,
malgré un bilan de règne plus que positif. Les grands
personnages se décèlent pourtant plus sûrement
dans les résultats obtenus, que dans l'agitation ostensible
sous les feux de la rampe. C'est là sans doute la vraie revanche
des austères besogneux sur les frivoles flamboyants : les
faits demeurent tenaces. Nous tenons ici une efficace réhabilitation
comme il en paraît parfois, sans manipulation ni récupération.
Une réussite !
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